Les "qualifs" de Grand Chelem, prochaine étape pour Marie Benoit
L'année n'a pas mal commencé pour l'Eupenoise Marie Benoit qui, à 24 ans, espère entrer pour la première fois en ordre utile pour les qualifications en Grand Chelem.
Après des saisons passées au centre AFT, Marie Benoit poursuit sa route sur le circuit pro au sein de l'académie du TC Eupen sous la houlette d'Olivier Zimmermann et de Marc Vogel. Elle peut également compter sur l'apport de la fondation Hope and Spirit avec laquelle elle s'est retrouvée en stage au mois de décembre, à Abu Dhabi. Une initiative bénéfique puisqu'elle s'est imposée lors du premier tournoi de l'année qu'elle a disputé, le 25.000 dollars de Daytona Beach en Floride. La semaine dernière, elle a également atteint les demi-finales d'un tournoi de même rang à Glasgow, bénéficiant en passant de quelques retraits adverses plus ou moins justifiés. Elle occupe pour l'heure le 249e fauteuil mondial, elle a gagné une petite cinquantaine de places depuis le Nouvel An et n'aura aucun point à défendre au mois de mars, ce qui lui permet d'espérer un classement lui ouvrant pour la première fois les portes des qualifications en Grand Chelem. Avant qu'elle ne parte disputer le tournoi d'Altenkirchen, en Allemagne, cette semaine et s'envole ensuite pour trois tournois 25.000 dollars au Brésil, on a fait le point avec elle.
Q. Marie, comment jugez-vous ce début d'année ?
R. De manière globale, cela s'est plutôt bien passé, même si 2020 ne fait que commencer et si je suis consciente qu'il me manque toujours un peu de constance. J'ai gagné un tournoi en Amérique, mais je m'y suis aussi faite éliminer au premier tour, dont un double 6-7, cela se joue parfois à peu de choses, et il y a les impondérables, la semaine dernière à Glasgow, au premier tour, je perds le premier set 6-2, à 2-2 au deuxième set la fille se bloque le dos, je ne dis pas que je n'aurais pas renversé la situation parce que j'étais bien revenue dans la partie, mais ça change la donne, et mon tournoi. Je suis finalement rentrée un peu déçue, en demi-finale il y avait mieux à faire, je n'ai pas joué une très bonne rencontre contre la Bulgare Tomova (WTA 148) même si ce fut un match serré malgré le score (3-6, 3-6).
Q. Si on suit votre classement en ligne générale, on constate une progression lente mais régulière. L'objectif à présent ce sont donc les qualifications en Grand Chelem...
R. ... A court, voire moyen terme, oui, c'est quand même pour ça qu'on joue au tennis. Je vise le Top 200 en fin de saison, mais je ne m'en contente pas, à long terme l'objectif reste de faire progresser mon niveau de jeu pour atteindre le Top 100. En 25.000 dollars, on croise des TOP 100/200, et elles n'ont franchement pas l'air d'extraterrestres. J'ai acquis de la maturité, j'ai plus confiance en mes capacités.
Q. Vous vous êtes fixée une deadline pour y arriver ?
R. C'est la question qui m'énerve (sourire). Je ne sais pas si je suis occupée à passer un cap, je ne sais pas combien de temps cela peut prendre, j'y vais année après année, quand je verrai la limite j'aviserai, là je n'y suis pas, tant que je sens une marge de progression, que j'en ai les moyens et que j'y prends plaisir, je continue. Je préfère progresser lentement mais sûrement, en essayant de ne pas trop me focaliser sur le classement, plutôt que de faire un gros coup et de redescendre ensuite, mais si je suis Top 300 dans trois ans c'est sûr que cela ne me satisfera pas.
Q. Votre père médecin, votre mère dentiste, tout le monde s'accorde à dire que vous avez les capacités et le goût pour les études, vous les reprendrez lorsque vous arrêterez le circuit ?
R. Certainement. La diététique surtout m'intéresse. Travailler un peu dans le cadre du sport aussi, mais je ne me vois pas donner des cours toute la journée, ou coacher à l'année. Dans la vie, on ne sait jamais, mais ce n'est pas ce que je recherche. Ce n'est pas un hasard si la plupart des entraîneurs pros sont des hommes. Difficile pour une femme qui veut fonder une famille de courir le monde 25 à 30 semaines par an.
Q. Vous profitez de vos temps libres pour déjà étudier un peu, comme quand vous étiez au centre AFT de Mons ?
R. Lorsque vous êtes justement sur le circuit pro 25 à 30 semaines par an, que vous êtes une bosseuse, que vous vous entraînez 5 à 6 heures par jour, que vous devez vous occuper vous-même des vols, des hôtels, c'est un job full time, il ne reste pas énormément de temps et vous avez plutôt tendance à le passer avec ceux qui vous sont chers.
Q. Comment avez-vous vécu le passage de la structure fédérale vers une organisation privée comme le club d'Eupen ?
R. L'AFT a changé d'optique, ce qui n'enlève rien au fait qu'elle m'a bien aidée durant pas mal d'années. J'ai pris ça de manière positive, l'occasion de changer d'air, de grandir un peu. J'ai l'image d'une fille gentille, respectueuse, correcte de caractère, on ne change pas ce qu'on est mais il est bon et utile de montrer un peu les dents de temps en temps.
Q. D'autant qu'à votre niveau on est loin du luxe que les gens imaginent en regardant le top mondial...
R. ... Ce n'est pas le même monde. Dans les tournois WTA, on est pris en charge, dans d'excellents hôtels, avec des kinés très compétents, de bonnes conditions d'entraînement. En 25.000 dollars, ça coûte, et il y a des endroits où c'est bien, mais aussi d'autres où les hôtels sont mauvais, les conditions de jeu compliquées, où c'est la galère.
Q. Comment on fait pour nouer les deux bouts ?
R. On fait attention, on cherche des logements moins chers, c'est un peu la débrouille, il y a aussi des gens, des partenaires qui vous soutiennent, le club d'Eupen fait beaucoup pour moi, Hope and Spirit, Luxilon pour le matériel, le Dex Easy Car Shopping et la région germanophone me soutiennent, et je joue les interclubs en Italie, en Allemagne, en Belgique, je sais que mes parents sont là au besoin mais j'essaie d'équilibrer moi-même mes comptes.
Q. En quoi vous êtes-vous améliorée sur le court ces derniers mois ?
R. J'ai progressé dans mes schémas de jeu vers l'avant, je me suis améliorée au service, même si c'est un des domaines dans lequel mon niveau de jeu manque encore de constance, c'est frustrant mais j'y travaille. Mon genre de tennis n'est pas le plus courant sur le circuit, je n'ai pas les frappes d'Ysaline (Bonaventure), donc il faut essayer de jouer avec ses propres armes, varier les coups en hauteur et en longueur, je les avais peut-être un peu délaissés, je les utilise de nouveau plus, c'est un jeu qui ennuie l'adversaire, un peu comme celui de Kirsten (Flipkens).
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