La sensation Jef Van Dorpe au Belgian Open
On a de nouveau vécu une mémorable édition du Belgian Open en fauteuil roulant sur les hauteurs de Géronsart, avec une assistance digne d'une organisation haut de gamme et une journée finale baignée par le soleil.
Qui plus est, on a pu enfin consacrer un lauréat belge en simple, le premier de l'histoire, mais pas celui que l'on attendait. Joachim Gérard, 5e mondial, qui rêve depuis des années de cette consécration "maison", a en effet trouvé son maître en la personne de son dauphin, le tout jeune Jef Van Dorpe, qui a couronné son succès en demi-finale d'un véritable triomphe en finale face au Suédois Stefan Olsson. A 18 ans, le gars de Saint-Nicolas, qui entre dans le Top 15 mondial et donc se rapproche des Jeux paralympiques de Tokyo l'an prochain, tient ses premières victoires références, face aux 5e et 6e mondiaux, ce n'est qu'un début, une belle carrière l'attend.
La toute première fois
Jef Van Dorpe a grandi dans le sillage, et avec devant lui l'exemple, de Joachim Gérard. Il a d'ailleurs partagé son coach, l'immensément regretté Marc Grandjean, dont le central du Belgian Open porte désormais le nom et auquel il a rendu hommage après sa victoire ("un homme, un ami, un entraîneur incroyable"). Le jeune Néerlandophone, numéro un et champion du monde juniors l'an dernier, n'avait encore jamais battu son aîné. Et il faut dire la vérité, avant la demi-finale qui devait opposer les deux Belges personne n'aurait sans doute misé un euro sur une victoire du teenager, même si on lui promet un bel avenir. S'il l'a acceptée avec la sportivité qu'on lui connaît, on imagine à quel point la défaite a dû être difficile à digérer pour notre numéro un, d'autant qu'il attend de s'imposer "chez lui" depuis au moins six ans et qu'il espérait bien sûr être le premier Belge à y arriver, cela ressemble de plus en plus à un signe indien. Si Van Dorpe, qui avait perdu le premier set 2-6, s'est montré à la hauteur de la tâche, s'imposant ensuite 6-4, 6-3, Gérard, lui, s'en voulait, très mécontent de son match ("Je n'ai pas joué", grinçait-il). Toujours est-il que cette première victoire majeure a pu servir de déclic à son adversaire, auquel les pronostics n'étaient pas plus favorables en finale, face à un autre ténor du circuit, Stefan Olsson, même si la terre battue n'est pas la meilleure surface du Suédois. Encore une fois, Jef Van Dorpe perdit la première manche 3-6, mais renversa ensuite la tendance 6-2, 6-3, dans une folle ambiance. "Déjà jouer au tennis devant autant de monde, pour nous, c'est exceptionnel, mais en plus battre Joachim pour la première fois, remporter dans la foulée mon premier "Grade 1", et être le premier Belge à gagner ici c'est tout bonnement inoubliable", lançait-il dans un grand moment d'émotion.
"Un état d'esprit tellement différent, qui fait du bien"
C'est peu dire que le jeune champion a fait impression. "Je ne suis pas un spécialiste du tennis en fauteuil", glissait Philippe Dehaes qui commentait en direct les images de l'événement, "même si je connais un peu Jef parce qu'il est aidé par Hopiness, la fondation de Carl Mestdagh, mais ce que j'ai vu là respire la classe, dans une ambiance et un état d'esprit tellement différents de ce que l'on vit d'habitude, ça fait du bien, ça régénère. Sportivement, Van Dorpe a réalisé de belles choses, mais surtout mentalement il est allé la chercher cette finale, même quand son service ou son coup droit lui jouait des tours il y est allé. Constance, stabilité, intelligence ne sont pas des qualités que l'on retrouve nécessairement à cet âge, je l'ai aussi trouvé adorable et bien éduqué dans son discours d'après-match. Il y a de l'avenir dans ce petit gars-là." Superbe apothéose, en tout cas, pour "tous ces fous furieux bénévoles qui vivent et respirent Belgian Open durant toute l'année", faisait remarquer Pierre Crevits, président de l'AFT Namur/Luxembourg. "L'air de rien, c'est la plus importante organisation tennistique francophone, avec plus de 250.000 euros de budget, des Top 10 mondiaux dans toutes les catégories, et 5.000 spectateurs au long de la semaine, avec des pointes à 6 ou 700 personnes pour l'exhibition du jeudi et la journée finale du dimanche." Un grand coup de chapeau, confirmé par le finaliste malheureux : "Après les Grands Chelems c'est ce qu'il y a de mieux", confiait Stefan Olsson. On s'en voudrait d'oublier les autres catégories, d'autant que Joachim Gérard et Stefan Olsson ont gagné le double messieurs comme à Wimbledon. En simple, aussi bien chez les dames qu'en quads on a également enregistré des vainqueurs inédits. La Chinoise Zhu Zhenzhen, 10e mondiale, a ainsi défait en finale la 4e mondiale hollandaise Marjolein Buis, Sabine Ellerbrock, tenante du titre, étant éliminée en quart de finale, tandis qu'en quads Lucas Sithole, 7e mondial, prenait le meilleur sur la première tête de série, le Hollandais Sam Schroder. Pour que vous sachiez mieux de quoi et de qui on parle sachez que Sithole, qui a gagné l'US Open en 2013, est un Sud-Africain noir qui a perdu ses deux jambes et son avant-bras droit dans un accident ferroviaire à l'âge de douze ans.
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