La prometteuse saison d'Alexander Blockx

Quand on commence l'année par un titre à l'Australian Open juniors et qu'on la termine par une demi-finale lors du premier tableau final du tournoi Challenger que l'on dispute, on peut parler de saison réussie, et même d'une certaine avance sur le tableau de marche attendu. L'Anversois Alexander Blockx, grande promesse de notre tennis, a franchi un premier cap plus vite qu'espéré, sans pour autant brûler les étapes. Portrait.
 

Posez la question à n'importe quel spécialiste du tennis, il vous dira que le passage le plus difficile à maîtriser pour un apprenti professionnel, si l'on excepte quelques surdoués, est celui qui sépare les compétitions juniores des tournois pour adultes, purgatoire dans lequel se perdent nombre d'ambitions ou d'illusions. Entendons-nous bien, la trajectoire d'Alexander Blockx n'est en rien comparable à celle d'un Carlos Alcaraz, vainqueur de Grands Chelems et numéro un mondial à 20 ans, et il est encore très loin de ce qu'un David Goffin a pu accomplir, mais ce qu'il vient de réaliser en cette fin de saison n'en reste pas moins particulièrement prometteur.
 
17 victoires en un mois
 
A 18 ans, après avoir remporté l'Open d'Australie juniors et être devenu numéro un mondial dans la catégorie, il vient, depuis l'European Open d'Anvers, d'aligner 19 matches en un mois sur le circuit pro et d'en gagner 17, remportant deux 25.000 dollars d'affilée et atteignant les demi-finales lors sa première expérience en tableau final d'un tournoi Challenger la semaine dernière, à Danderyd au Danemark, en sortant des qualifications.
Il y a non seulement dominé le Français Corentin Moutet (50e mondial il y a un an) ou l'ambitieux jeune Tchèque Jakub Mensik qui a disputé la finale de l'Australian juniors un an avant lui et a déjà atteint le troisième tour cette année à Flushing Meadows, mais il a surtout affiché en quelques semaines d'intéressants progrès au niveau du jeu.
 
"Le meilleur de ma carrière"
 
"Je n'avais pas imaginé franchir un tel cap si vite", confirme-t-il, "cela ne peut que me donner confiance pour la suite. Je pense avoir joué le meilleur match de ma carrière contre Moutet, j'avais le sentiment que je pouvais faire ce que je voulais avec la balle. Ce qui me satisfait le plus, c'est que j'ai fait preuve d'audace, que j'ai réussi à être dominant. Lors des moments importants, je suis moi-même allé chercher les points. J'ai pratiqué un tennis agressif et je n'ai pas eu peur de lâcher mes coups."
On a cru à une possible demi-finale belge avec David Goffin au Danemark. Mais c'était compter sans l'Américain Brandon Nakashima (ATP 143), un autre ancien Top 50 (qui a rétrogradé pour cause de blessures) dont la solidité et les frappes lourdes de fond du court ont eu raison de nos deux compatriotes.
 
Top 5 mondial de son âge
 
A cette occasion, et ce n'est peut-être pas plus mal, Alexander, repoussé cette fois derrière la ligne de fond et payant peut-être aussi l'accumulation des matches, a pu mesurer ce qui lui manque encore.
"Je n'ai jamais eu l'occasion de rentrer dans cette demi-finale", a-t-il reconnu. Après quelques jours de repos largement mérités, un bloc de six semaines de préparation attend à présent le jeune Anversois dans un état d'esprit boosté par ce qu'il vient de vivre.
Le programme des premiers tournois 2024 n'est pas encore connu, mais grâce à sa victoire à l'Open d'Australie junior, le jeune Anversois sait qu'il aura l'opportunité d'entrer dans au moins huit tournois Challenger, et qu'il pourrait même hériter d'une wild card pour les qualifications à Melbourne. Soit dit en passant, cela promet déjà pour le volet belge du prochain BW Open. Parti de rien en début d'année, Blockx se retrouve 350e à l'ATP et Top 5 mondial parmi les joueurs de son âge. De belles perspectives pour le tennis belge, sachant que, de son côté, Gilles Arnaud Bailly (ATP 468), qui part perfectionner son tennis durant six mois au Texas aux côtés de son frère Pierre-Yves, figure également dans le Top 10 des moins de 19 ans.
 
"Préserver l'envie de jouer"
 
Le parcours d'Alexander Blockx est intimement lié à celui de l'entraîneur qui l'a découvert il y a quatorze ans et qui suit sa progression depuis au sein de son académie implantée à Wommelgem, dans les installations de Forest Hills. Philippe Cassiers, un ancien joueur qui a rapidement bifurqué vers le coaching, n'a pas mis longtemps à comprendre qu'il tenait là une pépite, issu d'une famille de sportifs, accro au tennis, non seulement doué mais prêt à travailler dur et à suivre les conseils.
Dès sept ans, Alexander rivalisait avec des garçons deux ans plus âgés, à douze ans il comptait parmi les meilleurs Européens, à quatorze il était Top 5 mondial, il a fini troisième du prestigieux Orange Bowl en Floride, mais on en connaît d'autres qui ont vécu tout ça et dont on n'a plus guère parlé par la suite. On s'est d'ailleurs posé la question quand il a un peu disparu de la circulation il y a deux ans, en pleine croissance et accablé de bobos physiques, mais il est revenu plus fort.
"Il fallait être prudent avec son corps d'adolescent, éviter de trop en faire, garder le degré d'exigence sur le terrain mais préserver le plaisir et l'envie de jouer, on en récolte les fruits", dit Cassiers.
 
"Une place dans le Top 50"
 
Quand on quitte les juniors en tant que numéro un mondial, on doit commencer par apprendre à... perdre au plus bas échelon du circuit adulte, et c'est dur.
"Lorsque vous sortez trois fois de suite au deuxième tour d'un tournoi Future, vous finissez par vous demander si vous êtes assez bon", dit Alexander. "Cela m'est arrivé. On repart vraiment de zéro, ce qu'on a fait avant ne compte plus."
On peut dire qu'il apprend vite, et c'est un des principaux enseignements positifs de cette fin de saison. Avec un potentiel suffisamment large, un service amélioré du haut de son 1 m 94, un coup droit fort, la capacité de bien jouer les points importants, et un mental à soulever les montagnes, "il est en droit de viser une place dans le Top 50 mondial s'il continue à bosser comme il est occupé à le faire, mais il sait que ce ne sera pas l'année prochaine", conclut l'entraîneur. "Physiquement, il devra encore réaliser pas mal de progrès, notamment pour pouvoir tenir plus longtemps à un tout haut niveau, son revers doit devenir plus agressif, sa volée est une arme à travailler, quant au classement, il suivra si tout se met en place".
 
 

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