L'avis unanime avant Wimbledon : "Tous les capteurs sont au vert pour David Goffin"
Remonté à la 23e place mondiale, donc plus proche de sa valeur réelle au classement ATP, n'ayant jamais abordé Wimbledon avec autant de matches sur gazon dans les jambes - huit, dont une finale contre Federer à Halle -, et n'ayant aucun point à défendre sur les courts de l'All England Club puisqu'il y avait été éliminé au premier tour l'an dernier, "tous les capteurs sont au vert" pour David Goffin au moment de fouler ce lundi l'herbe londonienne. C'est en tout cas le sentiment des quelques spécialistes belges qui nous ont livré leur avis ce week-end.
David Goffin entamera le prestigieux tournoi londonien face à un Américain inconnu, mais néanmoins 89e mondial, Bradley Klahn. S'il passe l'obstacle, il se heurtera au vainqueur du match entre Klizan et Chardy, puis si tout va bien au troisième tour il pourrait se retrouver face à Medvedev ou Carreno Busta, et le cas échéant contre Tsitsipas en 1/8e de finale. On peut parler d'un parcours qui n'est pas simple, mais qui aurait pu être pire, et on ne cache pas notre espoir de voir le numéro un belge en deuxième semaine. Le plus important est sans doute l'état de forme et de confiance dans lequel il aborde ce tournoi de Wimbledon, mais d'autres en parlent mieux que nous.
Johan Van Herck : "C'était une question de temps"
"J'ai vu pour la première fois David Goffin et Thomas Johansson ensemble à Miami, au mois de mars, et j'ai de suite trouvé que cela "cliquait" entre eux", expliquait le capitaine de Coupe Davis et de Fed Cup à Filip Dewulf dans le journal flamand Het Laatste Nieuws. "J'ai alors pensé que c'était une question de temps avant que cela ne porte ses fruits. On ne doit pas oublier les blessures que David a subies et la séparation avec Thierry Van Cleemput intervenue en début d'année, ce sont des faits qui marquent. Quand on voit aussi le niveau qu'il faut atteindre pour rester dans le Top 20 ou 30 mondial on sait qu'il faut absolument être à 100 % pour revenir dans le coup. En jouant des matches et en se donnant du temps il y est arrivé, si on a une bonne relation avec son entraîneur, si on travaille dur et si on a le talent de David les qualités refont inévitablement surface. Je l'ai trouvé beaucoup plus présent sur le court ces dernières semaines, c'était frappant et c'est une question de confiance. A Roland Garros et à Halle, il a montré qu'il était de nouveau le Goffin d'avant. Dans ces conditions, on attend beaucoup de lui à Wimbledon, et c'est quelque part normal, mais je regarde plus loin, je pense à la suite de la saison, je crois que d'autres bons résultats nous attendent."
Philippe Dehaes : "Le sentiment que cela prend forme"
"L'impression est que l'on est au début de bonnes choses, que cela prend forme", résume Philippe Dehaes, l'ex-coach de Daria Kasatkina. "Je crois depuis le début à l'association entre David Goffin et Thomas Johansson qui a l'expérience de la compétition à ce niveau-là. On sait que David est un bon joueur, se déshabituer de quelque chose et construire du nouveau prend du temps, mais je pense que c'était une bonne chose, qu'il en avait besoin, quatre ou cinq ans d'affilée avec le même équipage sur le circuit c'est vraiment long, même si le job a certainement été fait. Une statistique m'a frappé ces derniers temps : le fait qu'il ait à chaque fois perdu contre celui qui a gagné le tournoi par la suite. Face à Nadal à Roland Garros, un match que j'ai commenté à la télé, personne n'aurait pu faire mieux que lui au premier set, Rafa était monstrueux, mais ensuite David a développé un niveau de jeu remarquable, il y est allé. Quand il décide lui-même du point, qu'il prend la balle tôt, qu'il n'a pas peur d'attaquer le filet, il est vraiment bien, il doit le faire tout le temps, David est un contreur, qui asphyxie l'adversaire, il doit garder le caractère offensif de son tennis, la concentration et l'intensité pour faire le jeu, il doit gagner plus de titres, jouer des demis en Grand Chelem, j'espère qu'il va se l'avouer et s'en convaincre."
Kristof Vliegen : "C'est de nouveau lui"
L'ancien héros de Coupe Davis, initiateur du tournoi "-16 ans" qui porte son nom au Set Wahis, vient de se lancer dans un nouveau projet de vie, une académie de tennis qui cible des jeunes élites de 12 à 17 ans au Thermae Sports de Merchtem. A propos de David Goffin, Kristof trouve aussi que le choix d'entraîneur a été bon, "quelqu'un qui a joué, gagné un Grand Chelem, qui a été 7e mondial et est calme comme David, lequel a dû faire son (petit) deuil, retrouver des points de repère, mais là c'est de nouveau lui. A Halle il a joué Top 10/15, c'est son vrai niveau, pas un coup d'éclat. Il a travaillé certaines choses, on sent qu'il y a une vision derrière. Dans un Grand Chelem, les premiers tours sont importants, surtout pour lui qui après deux matches joue souvent de mieux en mieux. Il ne va pas pour autant se balader, peu de gens connaissent Klahn mais il peut bien jouer et servir, Chardy peut être difficile sur gazon, bien sûr avec un bon Goffin cela doit passer, surtout en trois sets gagnants."
Simon Goffin : "Sortir de sa zone de confort"
Coach sur le circuit WTA - dernière joueuse en date Anastasia Pavlyuchenkova - et propre frère de David, Simon estime que le "couple" Goffin/Van Cleemput était "à la fin d'un cycle, d'une alchimie entre joueur et coach", qu'il était "temps pour un nouveau speech, ils le pensaient tous les deux". "C'est le résultat d'une accumulation de choses durant un an et demi", continue-t-il, "David était un peu perdu, baisse de motivation, de vivacité, difficulté de revenir après les blessures. Quand il y était presque, comme l'an dernier lorsqu'il est allé en demi-finale à Cincinnati, il rechutait. Les premiers mois avec Thomas Johansson ont également été un peu difficiles, mais là il est lancé, on sent qu'il est en progression, on voit aussi plus d'amorties, de slices de revers, il monte un peu plus. Non que ce soient des domaines qui n'aient pas été ciblés précédemment, mais cela se traduisait trop peu en match. Maintenant, cela commence à se mettre en place, en définitive c'est toujours David qui doit valider, et ne pas être trop dans l'émotion au moment de passer à la réalisation, ne pas craindre de sortir de sa zone de confort en fonction de la vision de ce que doit devenir son jeu dans les années qui viennent, pour aller chercher tout ce qu'il a dans la raquette, une sorte de version 2.0 du Goffin 2017. Car derrière ceux que j'appelle les trois "fantastiques" le niveau se resserre, les jeunes sont de plus en plus forts, il y a deux ans il y avait plus de marge qu'aujourd'hui entre la 11e et la 24 place mondiale."
Michel Bouhoulle : "Une bonne main et une bonne volée en fait"
C'est au coach, consultant TV et maître d'oeuvre du club du Bercuit Michel Bouhoulle que l'on doit l'expression "tous les capteurs sont au vert". "David n'a jamais joué autant de matches et ne s'est jamais autant entraîné sur gazon", continue-t-il, "c'est très compliqué de pronostiquer sur cette surface, mais il n'a rien à défendre, donc tout est bonus, zéro pression, et il peut au moins faire 1/8e de finale. A Roland Garros quelque chose s'est déclenché. Il a remporté ses matches sur des scores plutôt secs, et il est celui qui a gagné le plus de jeux contre Nadal, en soi ce n'est peut-être pas grand-chose mais pour lui cela a eu valeur de déclic. Tout comme la victoire face à Zverev à Halle, ce n'était sans doute pas la meilleure surface de l'Allemand, mais la prochaine fois qu'il se retrouvera devant un 5e mondial il saura qu'il peut le battre. Je trouve l'évolution assez significative, David semble un peu plus épanoui, plus confiant, il va plus vers l'avant, un peu plus au filet, et on constate qu'il a une bonne main, une bonne volée en fait, qu'il n'a pas assez souvent exploitée. Pourtant, je me souviens avoir vu chez Mouratoglou à Nice Thomas Johansson, alors consultant au côté de Thierry Van Cleemput qui n'était pas sur place, consacrer un entraînement entier à la volée. La clé c'est toujours le joueur, David va à son rythme, il est ainsi. Il m'a toujours semblé que, plus que dans son jeu, c'est dans l'enveloppe mentale qu'il devait faire le plus de progrès. Dans l'état d'esprit de dire "je peux battre les meilleurs pas deux fois par an mais toute l'année", et de confondre ceux qui pensent qu'il n'était pas heureux dans le Top 10 parce qu'il y avait d'énormes attentes. Je suis pour une approche positive, ambitieuse, il n'a pas la taille, ni le poids de la plupart de ses rivaux, mais il a d'autres qualités, un super oeil, il joue très très tôt, il est vif et léger, les jeunes arrivent mais pas encore en Grand Chelem, il reste de la place pour quelqu'un comme lui, je ne vois pas pourquoi il ne pourrait pas faire comme Thiem par exemple, qu'il a battu quatre fois sur cinq en 2016/2017. Je vais peut-être à contre courant en pensant que si Johansson n'est certainement pas un mauvais choix c'est plutôt une solution de confort, quelqu'un qui ressemble à David, avec lequel il a déjà travaillé, un peu introverti comme lui, au lieu d'oser peut-être aller vers un tempérament différent, plus extraverti. C'est juste une opinion, la mienne, rien de plus."
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