Un David Goffin comme on l'aime!
On ne l'avait jamais vu s'extérioriser après un match comme il l'a fait mardi pour célébrer sa victoire au premier tour de Roland Garros face au Français Giovanni Mpetshi Perricard qui venait de remporter l'ATP 250 de Lyon. David Goffin a sans doute évacué là une tonne de frustrations récentes, tout en montrant à quel point certains spectateurs français l'avaient énervé à coups de "Marseillaise" vindicative et de "Champions du monde" ironiques à l'intention des Belges, sans parler des noms d'oiseaux et des chewing-gums volants. Explications.
Le match que David Goffin a livré mardi en début de soirée face au récent vainqueur français du tournoi ATP de Lyon Giovanni Mpetshi Perricard, 20 ans et désormais 66e mondial, est peut-être, voire sans doute, de ceux qu'il aurait perdu ces derniers mois. Dans chacun des sets qu'il a cédés, il a, en effet, mené la danse, étant le premier à réussir le break, avant de se faire reprendre dès le jeu suivant et de s'incliner. Il a déjà courbé l'échine pour moins que ça dans tant de rencontres qu'il aurait pu gagner, il en a fait lui-même le constat.
22 aces
Face à son jeune adversaire, 2 m 03, qui a servi 22 aces (10 pour le Liégeois), David a été poussé au cinquième set alors qu'il aurait pu, ou dû, conclure plus tôt, et il a su aborder cette ultime manche comme si rien ne s'était passé, dominant le débat de toute son expérience malgré trois balles de break manquées d'entrée. Si les deux premiers jeux ont duré seize minutes, il prit ensuite deux fois l'engagement du Français pour s'imposer sans trembler.
"Je ne me cache pas derrière l'excuse d'une semaine chargée à Lyon. J'ai seulement perdu contre un mec qui était plus fort que moi et qui m'a battu à la régulière", reconnaissait sportivement Mpetshi Perricard. "Franchement, il a bien joué. Parfois, je ne savais quoi faire sur le court. Il retournait vachement long. Si je ne prenais pas l'ascendant dès les premières frappes, c'était beaucoup plus dur."
Intimidation
Même son de cloche chez David :
"Le premier set a été un peu décousu (avec d'entrée deux aces sur deuxième balle de Mpetshi à plus de 200 km/h, ndlr), mais quand j'ai trouvé mon rythme j'ai maîtrisé, et je savais que j'aurais des occasions. J'ai été devant tout le temps. Avec encore plus de sérénité et de confiance, j'aurais pu être à la douche une heure et demie plus tôt".
Si les encouragements belges ne manquaient pas sur un court 14 largement trop petit et transformé progressivement en étouffante fournaise, côté français on jouait l'intimidation aux limites du genre, sur fond de "Marseillaise" guerrière.
"Le public chaud bouillant m'a bien aidé quand j'étais breaké dans le 4e set, c'était cool", disait le Français. Pour Goffin, "qui ne méritait vraiment pas une telle animosité", écrit le journal L'Equipe, ce l'était moins. Au point que le d'habitude si placide Liégeois, une fois la dernière balle jouée, rendit aux supporters locaux la monnaie de leur pièce avec moultes gestes du bout des lèvres, du genre que l'on voit plus souvent sur les pelouses de foot, et en ne mâchant pas ses mots après coup devant les journalistes français.
"C'était une bonne bagarre, un vrai bras de fer, et une bonne victoire qui fait du bien, mais ce n'est pas la première fois que le public ici dépasse les bornes, c'est quoi la prochaine étape, des fumigènes ?", demandait le Liégeois. "Il s'agit d'un sentiment général dans le vestiaire et à l'ATP, ces gens essaient de te déstabiliser, te lancent des mots et invectives que je ne répéterai pas, il va falloir faire quelque chose, un gars m'a même balancé son chewing-gum à la figure au changement de côté. On ne voit pas ça dans les autres Grands Chelems, c'est malsain."
Zverev
Vainqueur 4-6, 6-4, 6-3, 6-7(4), 6-3 en 3 h 35,
"David, au delà du résultat pur, a surtout appliqué ce que l'on avait décidé et mis au point, d'un bout à l'autre du match, et sans lâcher ni baisser la tête, c'est ce qui compte le plus à mes yeux", insistait son coach Yannis Demeroutis.
Prochain rendez-vous désormais, jeudi, rien moins qu'Alexander Zverev, 4e mondial, qui vient d'éliminer Rafael Nadal de "son" tournoi et de gagner à Rome. Jusqu'ici les deux joueurs se sont affrontés cinq fois sur le circuit, mais jamais en Grand Chelem. L'Allemand mène 3-2, et toutes les rencontres ont été serrées, souvent en trois sets.
"C'est le joueur en forme, ce sera un grand moment, sur un grand court, et je n'aurai rien à perdre", sourit notre compatriote.
Quand on voit Zizou (Bergs) et David se qualifier de cette manière, on ne peut que retrouver le sourire, et Dieu sait si la grimace est plus belle.
Elise Mertens s'est mise elle-même en difficulté
Quand la Limbourgeoise s'est propulsée d'emblée à 4-0 face à l'Argentine Maria Lourdes Carlé, 82e mondiale, pugnace mais clairement à sa portée, on s'est dit que notre compatriote ne risquait pas trop le refroidissement lors de son premier tour sous le misérable crachin parisien. Deux heures plus tard, après avoir sauvé la bagatelle de six balles de set - on connaît sa résilience quand elle se trouve dos au mur -, Elise Mertens a dû attendre sa troisième balle de match pour s'imposer dans le tie-break d'une deuxième manche "montagnes russes" où elle a été menée 4-5, service argentin à suivre. Dos au mur, il faut dire que, pour une part, c'est Elise qui s'y est mise un peu toute seule (plus de 40 fautes directes !), et quant à l'avantage du service on peut douter de l'expression pour ce cas précis dans la mesure où sur vingt-deux jeux disputés (6-3, 7-6) douze se sont soldés par des breaks, cinq concédés par notre compatriote, sept par son adversaire. On a déjà vu du tennis féminin plus haut de gamme, mais on a aussi été tenu en haleine, plus que de raison même, avec un tie-break final à 10-8, et notre compatriote s'est finalement imposée en deux sets, c'est l'essentiel, même s'ils ont duré 2 h 26. Ce ne serait pas la première fois que notre "numéro une" grandirait au fil des matches dans un tournoi du Grand Chelem.
"Il ne faut surtout pas oublier que l'on a dû jouer dans des conditions parmi les plus difficiles que j'ai connues", soulignait Elise. "On a été sur le pont de 8 h du matin à 8 h du soir, avec un temps pourri, un match prévu à 11 h que l'on commence à 16 h, de la pluie par intermittence, notamment sur les premiers points du tie-break, je n'y voyais plus rien. J'ai très bien commencé, les conditions de jeu étaient encore assez rapides, après c'est devenu plus lourd, cela convenait mieux à mon adversaire qui a aussi moins raté. Il arrive un moment où il faut jouer point par point quoi qu'il arrive, ce n'était pas facile, mais cela a suffi, et le public m'a bien aidé."
Jeudi, au deuxième tour, en espérant qu'il fasse meilleur, la Limbourgeoise se retrouvera à nouveau face à une adversaire accessible, la Croate Petra Martic, 33 ans, WTA 81, dont le meilleur classement fut néanmoins 14e mondiale. Lors des quatre matches qui ont opposé les deux joueuses depuis 2018, notre compatriote s'est imposée à chaque fois.
Greet Minnen face à plus forte qu'elle
Si elle a eu la chance de jouer son match à temps et à heure, sous le toit du court Suzanne Lenglen, on doit dire que la Campinoise n'avait pas été gâtée au tirage au sort. Devoir se confronter d'entrée à la 4e mondiale, Elena Rybakina, était d'autant moins un cadeau qu'en dehors du début (Greet a mené 2-0) et de la fin de match (score final : 2-6, 3-6) la Kazakh n'a pas seulement frappé vite et fort, elle n'a pratiquement pas commis de fautes.
"Franchement, mon match n'était pas mal", disait notre compatriote, "mais durant dix jeux d'affilée elle n'a fait que des coups gagnants, j'ai eu quelques occasions sur la fin parce que "finir" un match n'est facile pour personne, mais elle était juste trop forte, une autre classe, 80 % de ses premiers services ont touché les lignes. J'ai pourtant l'impression d'avoir livré une de mes meilleures parties sur terre battue, contre quelqu'un de moins fort j'aurais certainement eu ma chance."
Son entraîneur Philippe Dehaes ne disait pas autre chose, en plaisantant : "On se sent un peu comme les cyclistes face à Pogacar (sourire). Sans rire, il faut être réaliste, ce n'est ce genre de joueuse que Greet doit battre pour l'instant pour encore progresser. A mes yeux, Ribakina est d'ailleurs la meilleure des trois ou quatre filles qui bagarrent au sommet du tennis féminin."
86e mondiale, Minnen caresse encore un infime espoir de se retrouver en ordre utile pour la qualification aux Jeux olympiques. "Je sais que j'en suis proche, en même temps cela ne dépend plus de moi", conclut-elle. "Je sais aussi que l'an dernier je n'aurais jamais pensé en être où j'en suis aujourd'hui."
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