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L'exploit monumental des Belges en Coupe Davis : Raphaël Collignon à la manière de Steve Darcis

C'est une fantastique "perf" qu'a réalisée l'équipe belge en s'imposant 2-3 en Australie et en se qualifiant pour le Final 8 de la Coupe Davis qui aura lieu en novembre à Bologne. C'est peu dire qu'elle n'était pas favorite, mais la victoire d'ouverture de Raphaël Collignon face au 8e mondial Alex De Minaur a propulsé nos compatriotes sur une lancée que le Liégeois lui-même a clôturé à la manière, jadis, de son coach et capitaine Steve Darcis. Chapeau bas.
 

On a vécu ce week-end un de ces inoubliables moments qui émaillent l'histoire de la Belgique en Coupe Davis, depuis Washer/Brichant jusqu'à Goffin/Darcis, en passant par Rochus/Vliegen entre autres. A la fois héros et héroïque, Raphaël Collignon restera dans l'histoire comme la figure de proue d'un groupe talentueux et soudé, sans peur et sans reproche, qui affrontait pourtant, à l'autre bout du monde, des adversaires mieux classés qu'eux dans une arène de 10.000 personnes chauffée à blanc. Raphaël Collignon a commencé par regarder droit dans les yeux le 8e mondial Alex De Minaur, et lui a fait subir le même sort qu'à Casper Ruud deux semaines plus tôt à l'US Open, malgré des crampes spectaculaires l'obligeant à raccourcir les échanges et à lâcher ses coups... ce qu'il est capable de faire à merveille.
 
"Je ne sais pas comment je suis arrivé à gagner", a-t-il avoué après le match, comme il l'avait fait après avoir battu Ruud à New York. Ceux qui le côtoient à l'entraînement depuis des années, en revanche, savaient qu'il en était capable, et que le plus gros travail consistait à l'en convaincre. Le reste de l'équipe belge a fait son job, comme disait Zizou Bergs, vainqueur de Jordan Thompson pour afficher un étonnant 0-2 au soir de la première journée, "sur le papier un petit miracle en soi" remarquait honnêtement le capitaine Steve Darcis. Du coup, dimanche, le double Gillé/Vliegen aurait déjà pu sceller la qualification belge, surtout après qu'il ait arraché la première manche au tie-break, mais c'est la paire australienne Hijikata/Thompson qui a finalement émergé (3-6, 4-6) pour relancer le débat après une partie indécise d'un excellent niveau.
 
Comme Alex De Minaur revanchard ne s'est plus laissé surprendre ensuite (2-6, 5-7), face à Zizou Bergs qui a pourtant servi pour le deuxième set à 5-4, on est revenu au point de départ, tout se jouant sur le dernier match entre Raphaël Collignon et Aleksandar Vukic (ATP 95, ex-48) préféré par Lleyton Hewitt à Jordan Thompson qui venait de disputer un double exigeant. Si le Liégeois n'avait rien à perdre samedi face à De Minaur, la pression était d'un tout autre ordre dimanche lors d'un cinquième match couperet... comme Steve Darcis en a gagné de mémorables par le passé contre l'Australie, en 2010 à Cairns et en 2017 à Bruxelles. Pour la petite histoire, au Palais 12, c'est ce même Jordan Thompson qu'il avait battu dans l'affrontement décisif pour la qualification en finale. Quant à son vis-à-vis Lleyton Hewitt, les confrontations avec notre pays tournent de plus en plus au cauchemar, 2007, 2010, 2017, 2025, c'est la quatrième fois d'affilée qu'il doit baisser pavillon contre la Belgique, d'abord en tant que joueur et ensuite comme capitaine.
 
"Je ne voulais surtout pas encombrer les esprits avec mes histoires du passé", répétait sans cesse notre capitaine, "mais dans ce cas précis, surtout sachant que Raph est sujet au stress, il était important pour lui de savoir que le mec assis sur la chaise avait déjà vécu la même chose. Quand on voit son premier jeu (perdu blanc avec trois doubles fautes), on peut d'ailleurs se dire que mes mots n'ont pas été brillantissimes (sourire), mais la chance qu'on a en Coupe Davis c'est qu'on peut se parler à chaque changement de côté, essayer de guider, changer un peu le cours des choses. Et voilà, il aime le fight, il a bien réagi, bien écouté, malgré la perte du premier set au tie-break, et il a su aller chercher la victoire dans une tension à couper le souffle (6-2, 6-3). Il a été formidable, durant tout le week-end c'était lui le boss, c'est ce que l'on va retenir. Je ne sais où est sa limite, et il a toujours besoin d'un peu de temps, mais pour devenir Mr Davis Cup il en faut un peu plus que ça quand même (sourire). On a en tout cas vécu un vrai week-end de Coupe Davis avec des rebondissements, des hauts et des bas, des matches à suspense, et au final on sort une victoire comme ça, contre un tel adversaire, c'est vraiment énorme."
 
Avec Collignon qui s'affirme, Bergs comme valeur sûre, Blockx qui arrive, voire Goffin et Onclin, avec aussi un état d'esprit passion très Coupe Davis, la Belgique peut sans doute retrouver des ambitions pour le futur proche. "On a de jeunes joueurs avec beaucoup de talent qui sont tous occupés à monter, et une bonne paire de double", confirme Steve. "On a une très belle équipe pour un petit pays comme le nôtre, mais bon an mal an il en a souvent été ainsi dans le passé. Ces gars sont venus sans hésiter en Australie en pleine saison, pour le pays, je trouve ça magnifique, je suis fier d'être le capitaine d'une équipe pareille. Cela pourrait effectivement faire à nouveau de la Belgique une grande nation de Coupe Davis".
 
Une chose est désormais assurée, notre équipe figurera dès cette année parmi les huit meilleures qui batailleront pour le Saladier d'argent à Bologne du 18 au 23 novembre. En plus de l'Italie, tenante du titre, elle s'y retrouvera en compagnie de l'Espagne, de la France, de l'Allemagne, de la République tchèque, de l'Argentine et de l'Autriche. Le tirage au sort des quarts de finale (à élimination directe) aura lieu mercredi sur la Piazza Maggiore.
 
 
Raphaël Collignon : "Je me suis prouvé pas mal de choses"
 
- Raphaël, en un peu plus de deux semaines, votre univers tennistique a changé de dimension, tout le monde vous connaît désormais, et pas seulement en Belgique...
 
- J'ai en tout cas appris énormément, et je me suis prouvé pas mal de choses. D'abord que je pouvais battre de très bons joueurs, et ensuite qu'en tant qu'équipe nous pouvions regarder tous les pays droit dans les yeux. Quand les gens du tennis apprendront qu'on a battu les Australiens à Sydney, ils ne pourront dire que "respect". Le challenge pour moi était de reproduire dimanche la même prestation conquérante que la veille, d'assumer mes responsabilités dans un match où il y avait beaucoup plus de pression. Ce fut une véritable course contre la montre pour être physiquement au rendez-vous. Samedi, j'étais quand même très mal en point, le staff a fait un boulot formidable.
 
- Au niveau fédéral, Steve Darcis a joué un grand rôle dans votre progression depuis que vous êtes passé pro, à quel point sa présence en tant que capitaine vous a-t-elle été précieuse ?
 
- Elle m'a énormément apporté, c'est évident. Il a tellement l'expérience des matches décisifs en Coupe Davis, avoir ses mots, pouvoir partager avec lui, et surtout être compris dans ce que je ressentais, à quel point c'est difficile de jouer un cinquième match, cela m'a beaucoup rassuré. Sa présence au bord du terrain m'a aidé à gérer mon stress et les situations compliquées. Je suis également allé chercher l'énergie auprès du banc, des gars qui étaient là pour m'encourager, en essayant de créer une symbiose entre nous, de communiquer avec eux pour qu'ils me transmettent leur adrénaline et que l'on aille chercher cette victoire tous ensemble. Je suis fier de moi et de l'équipe, c'était vraiment un week-end exceptionnel.
 
- Les gens qui vous ont découvert lors de ces deux matches ont dû vous trouver très fort mentalement...
 
- ... Arrêtez, mais bien sûr que non (sourire), je ne suis pas du tout quelqu'un de sang froid par nature. J'ai déjà dû beaucoup travailler mentalement, au contraire, et je dois encore le faire parce qu'il reste pas mal de points à améliorer, notamment dans la gestion de mon stress. Des rencontres comme celles-ci doivent en principe beaucoup m'aider à gérer les difficultés sur les tournois, comme j'ai pu le faire ici, je vais essayer d'en tirer profit durant le reste de la saison. Je dois pouvoir jouer mon meilleur tennis chaque semaine et pas seulement lors de gros matches, c'est à cela que je veux arriver, c'est là mon but."
 
 
 

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